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faq:ai-je_le_droit_de_regarder_un_film_en_streaming

Ai-je le droit de regarder un film en streaming ?

Le 05/10/2015, Marie a écrit :

Bonjour,
Je me demande si ma fille a le droit de regarder des films via "streaming" ?
Qu'en pensez-vous ?
Merci.

Bonjour Marie,
Je vais essayer de vous répondre de la façon la plus complète en évacuant toute ambiguïté concernant le terme "streaming"

Médéric 05/10/2015 23:38

Qu'est-ce que le streaming ?

Le streaming : une haute technologie

Streaming vient du mot anglais Stream qui signifie ruisseau, courant, ou flux (Gulf Stream). Streaming correspond donc au gérondif "en s'écoulant" ou "en train de s'écouler". Le principe technologique repose sur le téléchargement d'un contenu audiovisuel sans l'enregistrer à proprement parler sur un support de l'ordinateur. Pour cela, une fenêtre dynamique de quelques secondes est stockée dans un dossier temporaire de l'ordinateur en sorte que le navigateur web puisse lire cette séquence audiovisuelle qui avance en même temps que la lecture, puisse faire une pause, puis redémarrer la lecture. L'idée de base du streaming suppose que les données audiovisuelles téléchargées au-delà de quelques secondes sont censées être supprimées par le navigateur.

Le streaming est également la technologie utilisée pour le podcast audio, par exemple pour écouter le flux direct de Radio France Culture dans un navigateur web ou dans un lecteur multimedia ou bien les rediffusions d'émissions.

Sans l'annoncer, je viens d'introduire une distinction technique importante entre deux types de diffusion en streaming :

  • La diffusion en direct :
    Le serveur envoie les mêmes données, en même temps, à tous les navigateurs du monde qui le lui demandent.
    Historiquement, cette idée a d'abord été mise en œuvre par la technique de diffusion multicast (ou multi-diffusion) à l'intérieur d'un seul réseau local, diffusion éventuellement relayée à d'autres réseaux via des routeurs spécifiques.
    Dans le contexte du réseau de réseaux qu'est Internet, il y a par exemple le direct de Radio France Inter, le direct de ARTE TV ou les directs de Youtube.
    L'accès à ce type de données est gratuit à 99%
  • La diffusion à la demande :
    Le serveur recherche sur ses disques durs le fichier du contenu audio ou vidéo, puis commence à en envoyer le début à l'ordinateur qui en a fait la demande, et uniquement à celui-ci.
    Historiquement, cette idée a d'abord été mise en œuvre par la technique de diffusion Unicast (ou diffusion point à point) à l'intérieur d'un seul réseau local.
    Par rapport au déroulement d'un événement, on peut parler de diffusion en différé (ou rediffusion dans le vocabulaire télévisuel) : au contraire de la diffusion en direct, si un deuxième internaute demande une source de données qui vient juste d'être envoyée à un premier demandeur, alors il faut démarrer en parallèle une deuxième lecture du même fichier multimedia pour en envoyer le contenu à ce deuxième internaute. Dans le contexte d'internet, ces contraintes pesant sur la fluidité des échanges mondiaux sont allégées au moyen de réseaux spécialisés de serveurs et de centres de données répliquées à différents endroits de la planète appelés "Content delivery network" (CDN). Ainsi, lorsqu'un internaute européen demande un contenu Youtube non live et bien que tout soit contrôlé depuis des serveurs situés aux États-Unis, alors le flux de données a rarement besoin d'emprunter les dorsales Internet transatlantiques – ces câbles sous-marins qui peuvent constituer des goulets d'étranglement –, car il provient souvent de datacenters européens.
    L'accès aux données diffusées à la demande est soit gratuit comme les podcasts de Radio France Culture (accessible pendant 1000 jours via la page web de chaque émission et pendant un an via l'abonnement RSS) et la télévision de rattrapage (ou replay) ARTE +7 francophone, soit payant comme la la boutique ARTE TV.

La confusion entretenue autour du terme "Video à la demande"

Le terme "Vidéo à la demande" – de l'anglais VOD pour Video On Demand – est très largement mis en avant par les industries audiovisuelles dans une confusion volontaire entre la méthode technologique "Vidéo à la demande" expliquée ci-dessus et le label marketing "VOD" qui s'affiche comme "légal et payant" dans une opposition manichéenne à "illégal et gratuit".

En réalité, la vidéo à la demande désigne une technique et rien d'autre. Et l'accès à certaines rediffusions de contenus audiovisuels sont gratuits sans aucune limite de temps comme le magazine européen francophone Vox Pop de John Paul Lepers qui est diffusé chaque dimanche sur Arte.

Le streaming, un phénomène de société

De nos jours, visionner des contenus accessibles en streaming gratuit ou payant est un fait sociologique qui concerne toutes les tranches d'age et tous les milieux, quelque soit le capital économique ou culturel, y compris les grands consommateurs de salles de cinéma et de DVD, comme les journalistes culturels qui ne trouvent plus indécent de regarder une série TV en streaming plutôt que d'acheter ou de louer des DVD.

Ce phénomène de société que constitue la consommation d’œuvres multimedia en flux streaming s'explique :

  • Par la facilité d'accès via les moteurs de recherche
  • Par le progrès technologique :
    • Explosion phénoménale du nombre de data-centers, des technologies de Cloud computing et des infrastructures de réseaux (câbles sous-marins, etc.)
    • Augmentation du débit de transfert des données
    • Baisse des coûts d'acheminement due à la concurrence entre opérateurs
    • Multiplication des appareils connectés susceptibles de visualiser de la vidéo
  • Par l'application de la loi française Hadopi de 2009 qui a conduit :
    • Les consommateurs non informaticiens à devenir autodidactes et à fréquenter les forums plus spécialisés…
    • Les diffuseurs d’œuvres contrefaites situés hors territoire français à trouver une solution plus simple pour atteindre le grand public en se rémunérant via les espions publicitaires des pages web ou via des comptes "premium" vendus par des moyens légaux (carte bancaire, compte PayPal, etc.)
  • Par la baisse générale du niveau qualitatif d'exigence audiovisuelle des consommateurs :
    • Sur le plan visuel : l'arrivée de la webcam en 2000 (désormais sur tous les smartphones) a initié une normalisation des photos extrêmement mauvaises voire indigentes auprès desquelles n'importe quel cliché Polaroid du XXe siècle fait figure d’œuvres d'art. Puis la diffusion massive de films copiés, parfois directement filmés dans des salles de cinéma et ultra-compressés au format DivX ont habitué le regard contemporain à la mauvaise qualité. Enfin, la production massive de vidéos amatrices par smartphones, relayés jusqu'aux journaux télévisés, ont banalisé les petits formats d'images vidéo dont le rendu sur écran d'ordinateur est parfaitement indigeste. La perte du sens critique des images est tellement importante que l'on ne sait plus si l'on doit rire ou pleurer lorsque prises dans l'émotion d'événements collectifs tragiques, les autorités croient plus utile de diffuser dans les médias une photo grossière et pixelisée d'un individu recherché par la police, plutôt que son portrait-robot1)
    • Sur le plan sonore : toute compression dynamique du son en général, et toute compression importante des données audio(format MP3, etc.) en particulier – y compris dans les films diffusés en Haute Définition par les plateformes Youtube, Dailymotion et Vimeo – engendre une mauvaise qualité acoustique à l'insu de l'auditeur et accentue la fatigue et les atteintes auditives dues au volume sonore

Lecture en streaming et droits d'auteurs

Bien identifier et comprendre ce que fait un logiciel

Vis-à-vis des droits d'auteurs, il convient de se poser la question suivante :

Est-ce que le logiciel que j'utilise partage un contenu normalement payant, entre plusieurs ordinateurs connecté à un même réseau ?

Si je réponds oui à cette question, alors cela signifie que j'utilise un logiciel peer to peer pour un usage frauduleux. Il faut bien distinguer ce que permet un logiciel, c'est-à-dire la technologie qu'il apporte, de l'utilisation que j'en fais.

Les navigateurs web

Un navigateur web moderne est naturellement conçu pour regarder ou écouter des flux de contenus en streaming. Ceci s'effectue dans un sens unidirectionnel web → ordinateur. Si un contenu est délivré par un site web qui le diffuse frauduleusement parce qu'il est protégé par des droits d'auteurs et n'a pas d'autorisation de la part des ayant droit, alors cela constitue un préjudice pour ceux-ci. Mais le tort est du côté de celui qui a publié ce contenu.

Prenons l'exemple d'un commerçant non libraire, par exemple un restaurateur, qui affiche sur la vitrine de son restaurant un poème extrait d'un recueil sans l'autorisation de son auteur ou de ses ayants-droits : les passants qui s'arrêtent devant la vitrine ne peuvent pas être jugés coupables d'avoir lu ce poème sans avoir acheté le livre. Mais le restaurateur a commis un acte frauduleux en affichant publiquement le poème intégral (cf. droit de courte citation) aggravé par le cadre de son activité commerciale (il tire un bénéfice financier de quelque chose qui ne lui a rien coûté).
Il en est de même pour les œuvres librement accessibles sur le web au moyen d'un simple navigateur : l'internaute ne peut être tenu responsable de regarder un film gratuitement depuis un site de streaming via son navigateur même si l'accès au film par toutes les autres méthodes est payant.
Cependant, il va de soi que l'internaute doit s'abstenir de faire la promotion (réseaux sociaux, etc.) d'un site web fournissant du contenu frauduleux ou qui fournit simplement un lien hypertexte vers ce contenu.

Les logiciels P2P

La technologie qui permet de partager des données, en direct, de façon bidirectionnelle entre plusieurs ordinateurs reliés par un réseau informatique s'appelle pair à pair ou "Peer To Peer" (P2P).

En premier lieu et indépendamment de la question des données échangées, les logiciels P2P ne sont pas malveillants s'ils sont des logiciels libres. Par exemple, iMule/aMule et la plupart des logiciels torrent sont des logiciels libres. À contrario, le logiciel privateur Cacaoweb est un logiciel malveillant qui modifie des paramètres sensibles pour la sécurité à l'insu de l'utilisateur, l'espionne sans son consentement et cerise sur le gâteau, ne peut pas être désinstallé de Windows (il faut l'éradiquer au moyen d'un logiciel de maintenance sécuritaire).

La pratique de logiciels P2P est légitime uniquement à des fins d'échange de contenus libres de droits ou sous licence libre (des logiciels libres, des systèmes d'exploitation GNU/Linux, des musiques libres, des vidéos libres, des livres libres, etc.). Par exemple, via la Freebox v.6, le fournisseur d'accès Free met à disposition de ses clients un logiciel libre qui permet sous le protocole BitTorrent, d'échanger des fichiers 24/24h entre le disque dur de la Freebox et le reste du monde. Ce partage décentralisé permet notamment à des internautes habitant dans des pays sous dictature de télécharger une distribution GNU/Linux même si l'accès aux sites web proposant le téléchargement de cette distribution est bloqué (sous une dictature, l'utilisation d'un système d'exploitation Windows peut être extrêmement périlleux…).

Dans de nombreux pays dont la France, les autorités essaient de détecter les adresses IP (des box) et/ou les ordinateurs (via des logiciels mouchards) qui partagent des contenus non libres par une méthode P2P.

Dans la fiche pratique "Partage", voici ce que dit hadopi.fr du P2P :

[…]
Malheureusement, le peer to peer peut aussi être utilisé pour le partage de contenus sans l’autorisation des titulaires de droits (auteurs, artistes-interprètes, producteurs…), et donc de façon illégale. Il reste néanmoins un formidable outil et c’est à l’internaute de vérifier si le contenu qu’il télécharge est proposé sans l’accord des titulaires de droits (à plus forte raison s’il met lui-même ce contenu en ligne !). En cas de doute, mieux vaut s’abstenir de télécharger.

Il faut donc bien comprendre ce que l'on fait et ne jamais télécharger de logiciel P2P non libre, telle que la jolie et conviviale fumisterie Cacaoweb, qui vous incite à enfreindre la loi et vous empêche de contrôler pleinement votre ordinateur.

Cas particulier du streaming de rattrapage

La télévision de rattrapage (ou replay) consiste en la diffusion gratuite pendant une période limitée (souvent 7 jours) de contenus en streaming qui viennent d'être diffusés.

Certaines extensions (greffons) de navigateurs, et certains logiciels libres ou gratuits qui se font passer auprès des sites web pour des navigateurs mais demeurent parfaitement légaux, permettent d'accumuler les données de ces flux streaming de rattrapage pour les agréger sous la forme de fichiers multimedia. Il existe même certains sites web tout à fait légaux qui permettent "d'aspirer" le contenu multimédia d'autre sites web, tels que l'aspirateur à Culture, l'aspirateur à Musique et l'aspir'Inter du site regardfc.com.

Captvty

Le meilleurs logiciel de ce type, par sa convivialité et sa facilité d'utilisation, est sans doute Captvty, réalisé par Guillaume avec l'encouragement des dons des utilisateurs. Captvty permet notamment de télécharger une émission disponible en Replay sur le disque dur de l'ordinateur pour la regarder à tête reposée (voir page tutoriels d'utilisation > Captvty). De surcroît, tout se passe sans navigateur web, ce qui gêne profondément les chaînes de TV dont les pages web – comme tant d'autres sites – sont truffées de codes JavaScript servant à espionner le comportement des consommateurs.

Captvty : liste des programmes en Replay de France 2

Cependant, il est important de comprendre que le "droit à l'exception de copie privée" qui autorise le téléchargement d’œuvres multimedia depuis des sites de Replay doit impérativement respecter les 3 critères suivants que rapporte Romualdinho13 sur le site captvty.fr de Guillaume :

  • le copiste et l’usager doivent être la même personne : "[La copie] doit être faite par le copiste pour son usage propre"
  • la copie doit être faite pour un usage personnel et rester dans un cadre familial
  • la copie ne doit pas générer d’activité lucrative de la part du copiste

Regarder, en vitesse légèrement accélérée sous VLC, ARTE Journal précédemment téléchargé via Captvty : Regarder, en vitesse légèrement accélérée sous VLC, ARTE Journal précédemment téléchargé via Captvty

Si vous utilisez le logiciel de manière prolongée, vous pouvez considérer la possibilité de faire un don à Guillaume pour soutenir le maintien et le développement du logiciel.

Références

1)
Nous sommes de plus en plus bombardés d'informations visuelles et sonores alors que le temps manque pour les "métaboliser". C'est la définition du traumatisme. Est traumatique ce qui ne peut pas être psychiquement "métabolisé" sous la forme d'une élaboration psychique, c'est-à-dire "symbolisé". La photographie est une façon de lutter contre ce traumatisme, à la fois par ses images et par sa pratique.
Serge Tisseron, "Le mystère de la chambre claire, photographie et inconscient". Les Belles Lettres, 1996.
faq/ai-je_le_droit_de_regarder_un_film_en_streaming.txt · Dernière modification : 02/05/2023 00:17 de 127.0.0.1